"La vie n'est qu'une ombre qui passe, un pauvre acteur qui se pavane
et s'agite durant son heure sur la scène et qu'ensuite on n'entend plus"
Shakespeare - Macbeth
Depuis longtemps je rêvais de participer à un stage de théâtre, de tenter une expérience d'acteur. Voilà mon rêve exaucé avec la troupe " Pacifique et Compagnie" de Nouméa, qui séjourne chaque année sur l'île pour y réaliser des actions en faveur de la promotion de spectacles théâtraux, en particulier auprès des jeunes et des écoles.
Première journée
Nous avons été convoqués un dimanche en fin d'après-midi dans la cour du lycée par Café Falé, association dynamique de Wallis qui a pour but de promouvoir la lecture et l'ouverture culturelle du territoire de Wallis-et-Futuna. C'est elle qui se charge chaque année d'accueillir les membres de la troupe "Pacifique et Compagnie", de les héberger, de préparer leur programme d'intervention. Le (la?) metteur en scène Isabelle et Steev, acteur permanent de la troupe, Wallisien d'origine, se sont présentés à nous, le stage a pu débuter.
Le rituel mis en place allait être immuable lors des journées suivantes. Nous commencions toujours par des exercices physiques, qui avaient pour but avant tout de détendre et relaxer le corps, instrument essentiel du jeu de l'acteur, puis Isabelle nous donnait de petits exercices à pratiquer sous forme de jeu et en fin de séance, nous terminions par des improvisations thématiques à 3 ou 4 en réutilisant les apprentissages acquis .
Après l'échauffement, nous avons formé une ronde et nous nous sommes assis. Le premier exercice consistait à se lever à tour de rôle, à dire son prénom en l'accompagnant d'une seule phrase de son choix. A mon tour, je me suis levé "Je m'appelle Erhan, je déteste le théâtre" , je me suis rassis. Deuxième exercice, nous nous sommes disposés derrière une ligne, même punition, il fallait marcher jusqu'à une petite distance du groupe et répéter la même phrase face à celui-ci. C'est devenu amusant et instructif à partir du moment où Isabelle a demandé à n'importe qui d'aller dire sa propre phrase mais en adoptant la démarche, les attitudes, les mimiques et l'expression d'un autre qu'il s'agissait de reconnaître. Nous avons effectivement à chaque fois reconnu chacune des personnes. Vous en avez toujours rêvé, comment devenir moi ? Steev s'est levé, il a roulé des épaules, il a dit sa phrase avec un sourire aux coin des lèvres et un léger mouvement de tête en conclusion, c'était moi, tout le monde s'est marré ... Nouvelle activité, il fallait venir dire ces mots d'une manière totalement neutre, sans expressivité, aucun mouvement du corps parasite, aucune de nos mimiques habituelles. Chassez le naturel, il revient au galop, j'ai continué à hennir en bougeant légèrement la tête à la fin de chaque intervention, mouvement qui était à chaque fois totalement inconscient, imperceptible en ce qui me concerne ... Enfin, Isabelle nous a demandé de dire une phrase sur un ton différent à chaque fois, colère, angoisse, tristesse, etc ...
La première improvisation avait pour thème "Passer de la tristesse à la gaieté (ou inversement)", nous devions inventer une situation qui passait d'un sentiment à l'autre. Avec les deux autres compères, nous avions choisi une scène où le maire d'un petit village rendait un hommage aux soldats morts du village lors d'une cérémonie, puis il se retrouvait avec ses amis dans un bar pour faire des vannes, dire qu'il était excédé de faire le guignol lors des célébrations, que la guerre avait eu lieu il y a un siècle, que tout le monde s'en foutait, ... L'improvisation fut mauvaise, à l'instar de celle des autres, nous avions des problèmes de placement sur la scène, le scénario était mal ficelé, notre voix ne portait pas assez, et beaucoup d'autres détails qui ne collaient pas. Seule exception notable au milieu des tentatives avortées, un groupe avait imaginé le scénario de deux veuves se rendant dans le cabinet d'un notaire. L'une était la maîtresse et l'autre la femme officielle du défunt, toutes les deux affligées, en larmes apprenaient qu'elles en héritaient, mais le notaire mettait en jeu chaque part de l'héritage sous forme de jeu télévisé de questions-réponses et elles devenaient de vraies harpies pour essayer de capter les biens successifs. J'avais le vague sentiment d'avoir déjà vu ce principe d'une scène de la vie quotidienne basculant subitement en jeu télévisé, mais peu importe, l'improvisation réelle n'existe pas, nous nous servons toujours de notre mémoire en décalant des scènes lues, vues ou entendues au cinéma, à la télévision, autour de nous. L'idée de départ simple, loufoque et efficace entraînait le reste.
La deuxième improvisation m'a moins plu. Nous nous sommes mis en ronde, nous avons inventé une histoire, chacun devait créer une partie en quelques phrases puis passer le relais à son voisin. Elle est devenue d'une complexité incroyable, confuse, saugrenue car chacun y rajoutait des éléments extraordinaires, animaux qui surgissaient sur scène, personnages nouveaux, lieux qui changeaient en permanence. Nous avons du réinterpréter ce scénario par groupe de 5-6 personnes ; l'histoire ne parlait sans doute à personne, il faut un minimum de conviction pour interpréter, personne n'a fait d'étincelles.
Deuxième journée
Les quatre séances suivantes se sont déroulées en semaine, en fin d'après-midi dans une salle de classe de l'école "Sainte Thérèse de l'enfant Jésus" à Liku. Ici, l'Education Nationale est absente du cursus primaire et maternelle, qui est concédé à la mission catholique. Un laïcard pur et dur qui débarquerait à Wallis, ennemi intime du goupillon et de la soutane ferait des bonds insensés, pousserait sans cesse des cris d'orfraie face aux atteintes à la laïcité sur ce territoire d'Océanie. Sur une étagère de la pièce, collés sur quelques étagères, les dessins d'enfant du scénario le plus célèbre de l'Histoire puisqu'il la divise en deux.
Les intervenants étaient très bons. Steev dynamisait l'ensemble grâce à des exercices de relaxation amusants, il participait à certaines improvisations, il avait une grande présence physique, beaucoup d'imagination et son expérience boostait toujours le groupe. Isabelle avait une large palette de jeux à proposer, elle a su mener une progression pédagogique raisonnée tout au long de la semaine et elle savait capter lors de ses interventions l'attention de l'ensemble des participants.
Lors de cette séance, elle nous a donné quelques rudiments sur l'art du mime, l'importance du point fixe pour donner l'illusion de l'existence de l'invisible. L'improvisation la plus marquante de la journée tenait du principe célèbre du "téléphone arabe". Nous étions divisés en deux groupes, celui qui restait dans la salle inventait une histoire. Nous avons fait venir par la suite progressivement les personnes restées à l'extérieur. L'histoire inventée était mimée, le spectateur devait commenter la scène, donner un sens à ce qu'il voyait, puis il se transformait en acteur à son tour et devait reproduire la scène pour le suivant. Il était à la fois aussi amusant de commenter puis de mimer que de faire partie du groupe qui avait imaginé le scénario, car on se rendait compte des décalages, des ruptures quelquefois subtiles, parfois brutales qui pouvaient s'opérer d'un acteur à l'autre.
Avant de repartir, j'ai regardé la scène de la crucifixion sur les murs de la salle. Le Nouveau Testament nous est parvenu à partir de témoignages directs, puis de souvenirs de témoignages, puis de reconstructions de scribes : quelle est la part de vérité, quelle est la part inventée de cette étrange pièce de théâtre ?
Troisième journée
Jeu le plus marquant proposé lors de la troisième journée : sculpter le corps d'un autre participant qui devait rester inerte, les membres souples et fermes à la fois, pour lui donner l'expression que l'on souhaitait qu'il transmette au niveau du corps et du visage, surprise, joie, fureur, ... Isabelle nous a enseigné ensuite l'action mimée de boire un verre, la nécessité de détacher les gestes avec réalisme, d'exécuter le mouvement de manière très précise sans oublier aucune phase.
Exercice d'improvisation suivant : elle nous a demandé de marcher dans la salle au hasard et de nous mettre dans la peau d'un personnage, si possible éloigné de ce que nous sommes. Il a fallu lentement l'intégrer mentalement dans nos pensées, lui trouver un prénom pour se fondre petit à petit en lui, puis l'intégrer dans nos déplacements et enfin poser notre voix dans le personnage. Sculpture de la pensée, de l'allure, de la voix pour devenir un autre.
En qui me suis-je transformé? Au début, je voulais me mettre dans la peau d'un jeune de quartier défavorisé. Je me suis rendu compte au cours des déplacements qu'une personne avait eu la même idée puisqu'elle abordait les gens en disant "Putain, qu'est-ce que tu m'veux toi", hop hop j'ai changé de fusil d'épaule en quelques fractions de seconde pour éviter le doublon, je me suis transformé en boxeur prénommé Ricky, champion du monde de shadow-boxing. Kezaco ? C'est la discipline de "la boxe de l'ombre", qui consiste à boxer dans le vide en s'imaginant avec un adversaire devant soi. J'étais agile et souple, affûté et à l'aguet sur le ring, hop hop un direct, hop hop une esquive, hop hop un uppercut ... J'étais à fond dedans, dommage qu'aucune fédération de boxe ne crée une telle catégorie, alors qu'il y en a trois ou quatre à ma connaissance au niveau international ...
Nous devions aller sur scène à tour de rôle pour présenter la personne que nous étions devenus. La transformation opérée n'est jamais le fruit du hasard, elle mobilise des choses profondes de notre passé, conscientes ou secrètes en nous, j'avais choisi dans un premier temps de faire le jeune impertinent du quartier car c'était un rôle facile en ce qui me concerne puisque j'ai grandi au milieu d'eux, que je les ai observé, que je pouvais très facilement reproduire leurs attitudes, leur morgue, leur phrasé. J'aime beaucoup le sport, j'ai regardé de nombreux combats, je me suis passionné à un moment donné pour l'histoire de ce sport, j'ai pratiqué la boxe anglaise deux fois mais j'étais un vrai bouffon sur le ring lors des assauts, je ne pouvais être qu'un clown-boxeur. Sur une quinzaine de participants, il s'est trouvé deux femmes et un homme qui ont régressé pour jouer au petit enfant en bas âge. Il y a toujours un enfant qui sommeille en nous, nostalgique du royaume perdu des commencements, nous serions prêts à troquer la liberté que nous avons contre la sécurité et l'insouciance de la prime enfance. L'une des deux Wallisiennes qui participait au stage a joué à la "bonne soeur". C'est une image du quotidien pour les Wallisiens puisqu' il existe une congrégation de soeurs religieuses à Wallis, une famille est très honoré lorsque l'une de ses enfants choisit pour son avenir le couvent.
Ai-je réussi à sculpter mon corps, ma voix ? Chassez le naturel, il revient au triple galop, j'ai continué à hennir puisque de temps en temps les inflexions de la voix grave que je souhaitais adopter en tant que boxeur se lézardait, se transperçait pour faire place à mes intonations naturelles, un peu moins ... burnées ;-)
La dernière improvisation consistait à mettre en relation trois personnages, je me suis retrouvé avec une femme enceinte et un garagiste. Le scénario n'a pas du tout fonctionné dans notre groupe, nous étions convenus d'une histoire mais l'un des personnages s'en est écarté, a refusé toutes les propositions de jeu, ce qu'il ne faut jamais faire. Il y avait un manque criant de communication, la scène a fait flop, comme un flan ;-)
Pour le lendemain, Isabelle nous a demandé de venir avec des accessoires pour incarner un personnage qui serait l'opposé de celui que nous venions d'interpréter. Quel personnage pouvais-je interpréter, me suis-je dit ? ...
Après l'échauffement, nous avons formé une ronde et nous nous sommes assis. Le premier exercice consistait à se lever à tour de rôle, à dire son prénom en l'accompagnant d'une seule phrase de son choix. A mon tour, je me suis levé "Je m'appelle Erhan, je déteste le théâtre" , je me suis rassis. Deuxième exercice, nous nous sommes disposés derrière une ligne, même punition, il fallait marcher jusqu'à une petite distance du groupe et répéter la même phrase face à celui-ci. C'est devenu amusant et instructif à partir du moment où Isabelle a demandé à n'importe qui d'aller dire sa propre phrase mais en adoptant la démarche, les attitudes, les mimiques et l'expression d'un autre qu'il s'agissait de reconnaître. Nous avons effectivement à chaque fois reconnu chacune des personnes. Vous en avez toujours rêvé, comment devenir moi ? Steev s'est levé, il a roulé des épaules, il a dit sa phrase avec un sourire aux coin des lèvres et un léger mouvement de tête en conclusion, c'était moi, tout le monde s'est marré ... Nouvelle activité, il fallait venir dire ces mots d'une manière totalement neutre, sans expressivité, aucun mouvement du corps parasite, aucune de nos mimiques habituelles. Chassez le naturel, il revient au galop, j'ai continué à hennir en bougeant légèrement la tête à la fin de chaque intervention, mouvement qui était à chaque fois totalement inconscient, imperceptible en ce qui me concerne ... Enfin, Isabelle nous a demandé de dire une phrase sur un ton différent à chaque fois, colère, angoisse, tristesse, etc ...
La première improvisation avait pour thème "Passer de la tristesse à la gaieté (ou inversement)", nous devions inventer une situation qui passait d'un sentiment à l'autre. Avec les deux autres compères, nous avions choisi une scène où le maire d'un petit village rendait un hommage aux soldats morts du village lors d'une cérémonie, puis il se retrouvait avec ses amis dans un bar pour faire des vannes, dire qu'il était excédé de faire le guignol lors des célébrations, que la guerre avait eu lieu il y a un siècle, que tout le monde s'en foutait, ... L'improvisation fut mauvaise, à l'instar de celle des autres, nous avions des problèmes de placement sur la scène, le scénario était mal ficelé, notre voix ne portait pas assez, et beaucoup d'autres détails qui ne collaient pas. Seule exception notable au milieu des tentatives avortées, un groupe avait imaginé le scénario de deux veuves se rendant dans le cabinet d'un notaire. L'une était la maîtresse et l'autre la femme officielle du défunt, toutes les deux affligées, en larmes apprenaient qu'elles en héritaient, mais le notaire mettait en jeu chaque part de l'héritage sous forme de jeu télévisé de questions-réponses et elles devenaient de vraies harpies pour essayer de capter les biens successifs. J'avais le vague sentiment d'avoir déjà vu ce principe d'une scène de la vie quotidienne basculant subitement en jeu télévisé, mais peu importe, l'improvisation réelle n'existe pas, nous nous servons toujours de notre mémoire en décalant des scènes lues, vues ou entendues au cinéma, à la télévision, autour de nous. L'idée de départ simple, loufoque et efficace entraînait le reste.
La deuxième improvisation m'a moins plu. Nous nous sommes mis en ronde, nous avons inventé une histoire, chacun devait créer une partie en quelques phrases puis passer le relais à son voisin. Elle est devenue d'une complexité incroyable, confuse, saugrenue car chacun y rajoutait des éléments extraordinaires, animaux qui surgissaient sur scène, personnages nouveaux, lieux qui changeaient en permanence. Nous avons du réinterpréter ce scénario par groupe de 5-6 personnes ; l'histoire ne parlait sans doute à personne, il faut un minimum de conviction pour interpréter, personne n'a fait d'étincelles.
Deuxième journée
Les quatre séances suivantes se sont déroulées en semaine, en fin d'après-midi dans une salle de classe de l'école "Sainte Thérèse de l'enfant Jésus" à Liku. Ici, l'Education Nationale est absente du cursus primaire et maternelle, qui est concédé à la mission catholique. Un laïcard pur et dur qui débarquerait à Wallis, ennemi intime du goupillon et de la soutane ferait des bonds insensés, pousserait sans cesse des cris d'orfraie face aux atteintes à la laïcité sur ce territoire d'Océanie. Sur une étagère de la pièce, collés sur quelques étagères, les dessins d'enfant du scénario le plus célèbre de l'Histoire puisqu'il la divise en deux.
La Passion
On a toujours besoin d'un(e) ami(e)
Les intervenants étaient très bons. Steev dynamisait l'ensemble grâce à des exercices de relaxation amusants, il participait à certaines improvisations, il avait une grande présence physique, beaucoup d'imagination et son expérience boostait toujours le groupe. Isabelle avait une large palette de jeux à proposer, elle a su mener une progression pédagogique raisonnée tout au long de la semaine et elle savait capter lors de ses interventions l'attention de l'ensemble des participants.
Lors de cette séance, elle nous a donné quelques rudiments sur l'art du mime, l'importance du point fixe pour donner l'illusion de l'existence de l'invisible. L'improvisation la plus marquante de la journée tenait du principe célèbre du "téléphone arabe". Nous étions divisés en deux groupes, celui qui restait dans la salle inventait une histoire. Nous avons fait venir par la suite progressivement les personnes restées à l'extérieur. L'histoire inventée était mimée, le spectateur devait commenter la scène, donner un sens à ce qu'il voyait, puis il se transformait en acteur à son tour et devait reproduire la scène pour le suivant. Il était à la fois aussi amusant de commenter puis de mimer que de faire partie du groupe qui avait imaginé le scénario, car on se rendait compte des décalages, des ruptures quelquefois subtiles, parfois brutales qui pouvaient s'opérer d'un acteur à l'autre.
Avant de repartir, j'ai regardé la scène de la crucifixion sur les murs de la salle. Le Nouveau Testament nous est parvenu à partir de témoignages directs, puis de souvenirs de témoignages, puis de reconstructions de scribes : quelle est la part de vérité, quelle est la part inventée de cette étrange pièce de théâtre ?
Troisième journée
Jeu le plus marquant proposé lors de la troisième journée : sculpter le corps d'un autre participant qui devait rester inerte, les membres souples et fermes à la fois, pour lui donner l'expression que l'on souhaitait qu'il transmette au niveau du corps et du visage, surprise, joie, fureur, ... Isabelle nous a enseigné ensuite l'action mimée de boire un verre, la nécessité de détacher les gestes avec réalisme, d'exécuter le mouvement de manière très précise sans oublier aucune phase.
Exercice d'improvisation suivant : elle nous a demandé de marcher dans la salle au hasard et de nous mettre dans la peau d'un personnage, si possible éloigné de ce que nous sommes. Il a fallu lentement l'intégrer mentalement dans nos pensées, lui trouver un prénom pour se fondre petit à petit en lui, puis l'intégrer dans nos déplacements et enfin poser notre voix dans le personnage. Sculpture de la pensée, de l'allure, de la voix pour devenir un autre.
En qui me suis-je transformé? Au début, je voulais me mettre dans la peau d'un jeune de quartier défavorisé. Je me suis rendu compte au cours des déplacements qu'une personne avait eu la même idée puisqu'elle abordait les gens en disant "Putain, qu'est-ce que tu m'veux toi", hop hop j'ai changé de fusil d'épaule en quelques fractions de seconde pour éviter le doublon, je me suis transformé en boxeur prénommé Ricky, champion du monde de shadow-boxing. Kezaco ? C'est la discipline de "la boxe de l'ombre", qui consiste à boxer dans le vide en s'imaginant avec un adversaire devant soi. J'étais agile et souple, affûté et à l'aguet sur le ring, hop hop un direct, hop hop une esquive, hop hop un uppercut ... J'étais à fond dedans, dommage qu'aucune fédération de boxe ne crée une telle catégorie, alors qu'il y en a trois ou quatre à ma connaissance au niveau international ...
Nous devions aller sur scène à tour de rôle pour présenter la personne que nous étions devenus. La transformation opérée n'est jamais le fruit du hasard, elle mobilise des choses profondes de notre passé, conscientes ou secrètes en nous, j'avais choisi dans un premier temps de faire le jeune impertinent du quartier car c'était un rôle facile en ce qui me concerne puisque j'ai grandi au milieu d'eux, que je les ai observé, que je pouvais très facilement reproduire leurs attitudes, leur morgue, leur phrasé. J'aime beaucoup le sport, j'ai regardé de nombreux combats, je me suis passionné à un moment donné pour l'histoire de ce sport, j'ai pratiqué la boxe anglaise deux fois mais j'étais un vrai bouffon sur le ring lors des assauts, je ne pouvais être qu'un clown-boxeur. Sur une quinzaine de participants, il s'est trouvé deux femmes et un homme qui ont régressé pour jouer au petit enfant en bas âge. Il y a toujours un enfant qui sommeille en nous, nostalgique du royaume perdu des commencements, nous serions prêts à troquer la liberté que nous avons contre la sécurité et l'insouciance de la prime enfance. L'une des deux Wallisiennes qui participait au stage a joué à la "bonne soeur". C'est une image du quotidien pour les Wallisiens puisqu' il existe une congrégation de soeurs religieuses à Wallis, une famille est très honoré lorsque l'une de ses enfants choisit pour son avenir le couvent.
Ai-je réussi à sculpter mon corps, ma voix ? Chassez le naturel, il revient au triple galop, j'ai continué à hennir puisque de temps en temps les inflexions de la voix grave que je souhaitais adopter en tant que boxeur se lézardait, se transperçait pour faire place à mes intonations naturelles, un peu moins ... burnées ;-)
La dernière improvisation consistait à mettre en relation trois personnages, je me suis retrouvé avec une femme enceinte et un garagiste. Le scénario n'a pas du tout fonctionné dans notre groupe, nous étions convenus d'une histoire mais l'un des personnages s'en est écarté, a refusé toutes les propositions de jeu, ce qu'il ne faut jamais faire. Il y avait un manque criant de communication, la scène a fait flop, comme un flan ;-)
Pour le lendemain, Isabelle nous a demandé de venir avec des accessoires pour incarner un personnage qui serait l'opposé de celui que nous venions d'interpréter. Quel personnage pouvais-je interpréter, me suis-je dit ? ...
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Ton article tombe bien, cette année j'accentue le mime et le jeu d'acteur dans mes cours de cirque. Je reprendrai donc l'idée du passage d'un sentiment à un autre, le téléphone mime, la sculpture avec les sentiments sur le visage et se créer son personnage opposé. Comme d'habitude je remarque que tous les exercices pédagogiques se ressemblent les tiens wallisiens ne sont pas radicalement différents des miens strasbourgeois, mais, avec une plus large palette, l'enseignant devient plus subtil, plus juste par rapport à la situation d'enseignement. Merci donc à toi Erhan.
RépondreSupprimerSinon quelques péripéties scolaires pleines d'enseignement (on passe sa vie à apprendre décidément) et 2 semaines de respiration qui se profilent. Mes élèves en boxe progressent, il n'en restera peut être plus un seul capable d'évoluer dans ta fédération d'ici quelques semaines.
Rémy
Tout tombe toujours bien dans la vie ... J'ai encore la deuxième partie de l'article à te proposer, même si elle sera moins pratique et plus tournée vers la réflexion, si je fais encore un stage cette année (en fait ce stage date de mai-juin 2012, article mis de côté lors de ma phase crampe d'écrivain et repris maintenant), je t'enverrai une fiche de cours, je pressens que l'enseignante a beaucoup d'autres exercices dans sa musette.
RépondreSupprimerPour la boxe, je suis définitivement hors-catégorie, nageur-boxeur même d'après Claude si je me souviens, j'en parlerai peut-être un jour sur ce blog de cette scène...
Keep smiling