" (...)Lumière sur lumière. Dieu guide vers Sa lumière qui Il veut.
Dieu propose aux hommes des paraboles et Dieu est Omniscient."
Sourate 24 verset 35
Visions nocturnes
Je viens de quitter la maison pour une promenade de nuit en scooter, je tourne tranquillement et je m'engage sur la route territoriale n° 2 vers l'aéroport. Je m'avance de quelques dizaines de mètres ... Tout à coup, j'entends une petite série de claquements secs à ma gauche, je lève les yeux au dessus d'une grappe de buissons verts foncé...
Apparition soudaine d'un oiseau blanc (est-ce une mouette ?) à une très faible distance de moi, qui traverse perpendiculairement la route ...
Moment de grâce infinie, éclat poudroyant de blancheur qui volette, qui esquisse une légère descente à une petite hauteur de mon regard pour remonter et disparaître derrière la corolle des palmiers et les cieux ...
Traversée magique de mon espace dans la lumière, souffle aérien et pur qui me transporte ... Les battements d'ailes de cet éclair immaculé se coordonnent secrètement avec celui de mon coeur Boum boum, chacune des palpitations de mon âme entre en résonance avec les oscillations coordonnées de l'oiseau pour retentir comme une cymbale étourdissante dans la nuit de Wallis...
Émerveillement absolu de l'instant éphémère ... Je m'arrête, je tente de le suivre des yeux, de scruter la pénombre, de continuer à écouter les bruits qui scandent le silence mais nulle trace de l'apparition enchanteresse, sinon désormais dans ma mémoire souveraine.
Je continue le chemin. L'ombre de la nuit wallisienne m'entoure comme un manteau épais et chaud, seule la lumière de mon phare éclaire l'espace, elle forme une bulle apaisante qui s'étend quelques mètres devant moi, dans laquelle je m'enveloppe avec gratitude. Au fur et à mesure de mon avancée, la lueur éclaire les palmes des cocotiers, les épines verdoyantes des pins, quelques étincelles colorées de fleurs dansent fugitivement, témoins somptueux du présent, jaune, rose pâle, rouge. Les étoiles des lointaines constellations répercutent sur la terre le reflet de leurs anciennes et gigantesques explosions. Les rares lampadaires ponctuent mon parcours et scandent l'espace avec leur halo illuminé en altitude, petites bulles lumineuses flottantes en écho à la lueur de mon engin, puis disparaissent une fois que je les ai dépassés. Je frôle du regard les trois fils électriques suspendus qui montent à l'approche des poteaux, redescendent avec grâce, m'accompagnent dans ma course légère, nonchalante. Mon coeur résonne doucement dans la nuit, les électrons contenues dans ma poitrine pressentent la charge foudroyante présente dans les câbles, qui s'en vont le long des chemins de traverse pour apporter les images et les sons du village planétaire, aux uns portant la paix, aux autres le souci.
J'aperçois au loin des voitures sur la route dont les lumières grandissent lentement, elles semblent se diriger sur moi, mais à chaque fois elles disparaissent côté coeur en m'éblouissant dans un dernier éclat. Parfois, je perçois leur lueur derrière une colline, c'est une immense boule de feu, un incendie qui me semble couver de l'autre côté de la pente. Lorsque je perçois la présence d'un véhicule derrière moi, je ralentis, je me déporte vers la droite, tôt ou tard c'est le dépassement et les feux arrière, rouge ardent, scintillent puis s'éloignent loin de mes pensées. Je continue tranquillement avec le feu solitaire de mon scooter, cyclope au casque vert, au coeur tonitruant.
J'arrive face au seul rond-point de l'île. Au milieu de celui-ci se dresse un poteau en bois, solidement planté dans la terre, surmonté de quatre tiges métalliques recourbées qui se terminent par des lueurs pointées vers les quatre routes offertes à moi quand j'aborde ce carrefour.
Je me souviens immédiatement des flocons magnifiques, don végétal de la terre, des plantes, des arbres capturés par le vent, qui tournoyaient dans une grâce qui ne fut connu que de moi seul.
Je m'en souviens encore.
Après une soirée chez des amis, je reviens par la RT2. Je suis à une distance encore éloignée de la maison, le vent se lève, souffle par rafales puissantes. Je vois de grandes lueurs à l'est qui illuminent fugitivement la bande étroite séparant la mer et le ciel. Elles m'accompagnent durant tout le parcours, explosions brèves, magnifiques zébrant tour à tour l'horizon sombre. Lorsque je tourne à gauche vers la RT2, je me rends compte que ces lumières s'élèvent aussi par moment au nord et à l'ouest. Je m'arrête, j'enlève mon casque pour essayer de percevoir le bruit du tonnerre, pour pouvoir déterminer la distance des orages. Mais nul son ne me parvient. Pourtant les lueurs muettes continuent à virevolter, Uvéa me semble cerné par la furie des tempêtes. Je continue ma route, environné par les éclairs fantastiques, précédé, éclairé, guidé par la douce lumière du phare de mon scooter.
Je rentrais d'un cours de salsa vendredi soir. Une pleine lune, immense, resplendissait dans la voûte céleste. Les nuages épais, flottaisons laiteuses, voguaient rêveusement sur la surface du ciel d'une couleur bleue très foncée qui s'approfondissait à l'infini. L'éclat de la lumière était tel que même lorsqu'il se glissait derrière les nuages, on devinait nettement les contours du disque lunaire. Et au fur et à mesure de son avancée dans la blancheur lactée, dès qu'une trouée s'opérait au sein des nuées, la lune s'enveloppait d'un halo aux couleurs chatoyantes de l'arc-en-ciel
Je continue le chemin. L'ombre de la nuit wallisienne m'entoure comme un manteau épais et chaud, seule la lumière de mon phare éclaire l'espace, elle forme une bulle apaisante qui s'étend quelques mètres devant moi, dans laquelle je m'enveloppe avec gratitude. Au fur et à mesure de mon avancée, la lueur éclaire les palmes des cocotiers, les épines verdoyantes des pins, quelques étincelles colorées de fleurs dansent fugitivement, témoins somptueux du présent, jaune, rose pâle, rouge. Les étoiles des lointaines constellations répercutent sur la terre le reflet de leurs anciennes et gigantesques explosions. Les rares lampadaires ponctuent mon parcours et scandent l'espace avec leur halo illuminé en altitude, petites bulles lumineuses flottantes en écho à la lueur de mon engin, puis disparaissent une fois que je les ai dépassés. Je frôle du regard les trois fils électriques suspendus qui montent à l'approche des poteaux, redescendent avec grâce, m'accompagnent dans ma course légère, nonchalante. Mon coeur résonne doucement dans la nuit, les électrons contenues dans ma poitrine pressentent la charge foudroyante présente dans les câbles, qui s'en vont le long des chemins de traverse pour apporter les images et les sons du village planétaire, aux uns portant la paix, aux autres le souci.
J'aperçois au loin des voitures sur la route dont les lumières grandissent lentement, elles semblent se diriger sur moi, mais à chaque fois elles disparaissent côté coeur en m'éblouissant dans un dernier éclat. Parfois, je perçois leur lueur derrière une colline, c'est une immense boule de feu, un incendie qui me semble couver de l'autre côté de la pente. Lorsque je perçois la présence d'un véhicule derrière moi, je ralentis, je me déporte vers la droite, tôt ou tard c'est le dépassement et les feux arrière, rouge ardent, scintillent puis s'éloignent loin de mes pensées. Je continue tranquillement avec le feu solitaire de mon scooter, cyclope au casque vert, au coeur tonitruant.
J'arrive face au seul rond-point de l'île. Au milieu de celui-ci se dresse un poteau en bois, solidement planté dans la terre, surmonté de quatre tiges métalliques recourbées qui se terminent par des lueurs pointées vers les quatre routes offertes à moi quand j'aborde ce carrefour.
Quatre lumières Quatre directions
Quelle route emprunter, me dis-je ? La plus naturelle est celle de droite, c'est l'inclination naturelle de mon esprit, je m'y engage prudemment. Artère large et sereine, dans laquelle je transporte avec douceur ma raison, boussole indéfectible de mon être. Il m'arrive de me projeter aussi vers l'itinéraire en face, dans la direction exactement opposée, de me jeter corps et âme vers quelques rêves démesurés. J'accélère, je sens les battements fabuleux de ma poitrine s'enfler au rythme de ma respiration. Parfois , je trace les trois quarts d'un cercle et je choisis le chemin à gauche, côté coeur. Vibrations intenses, couleurs passionnelles ou délicates, pleurs et rires se partagent sauvagement ma poitrine. Très rarement, il m'arrive de rebrousser chemin après avoir décrit une ronde autour du rond-point. Je me dirige avec tranquillité vers la route étroite et mince, qui s'ouvre comme une veine à mon passage. Mon phare éclaire à nouveau tous les paysages dépassées du passé ; je contemple, fasciné, les détails qui avaient échappé à ma vigilance, comment avaient-ils pu m'échapper ? La beauté émerge, encore, toujours.
Je rentrais chez moi, je m'approchais de l'aéroport en pleine nuit lorsque je sens un fort vent s'élever. Puis, pendant quelques secondes, je suis entouré d'une neige irréelle qui semble tourbillonner autour de moi. Elle scintille sous les feux éblouissants de mon phare, elle me rappelle les neiges que je voyais descendre, s'abattre majestueusement du ciel d'Alsace durant mon enfance, mon adolescence, mon âge mûr. Je suis émerveillé, je m'arrête un instant, je comprends finalement qu'il s'agit de brindilles, de petites parcelles de feuilles desséchées emportées par les rafales, formant devant mes yeux un amas flottant, éphémère, évanescent. Je vois s'éloigner ces volutes lumineuses. Avant même que je redémarre, que le son du moteur ne jaillisse ... Bang Bang pétarade de la pluie sur mon casque ... Ce vent était annonciateur de la tempête qui commence à déferler. J'avance les yeux froncés, irrités par la pluie corrosive qui s'abat depuis les cieux. Je roule péniblement jusqu'à la maison, devinant plus que visionnant les quelques mètres devant moi, heureusement la distance est faible jusqu'à ma destination. Un soulagement incroyable me saisit lorsque j'arrive enfin sous le porche. Je me souviens immédiatement des flocons magnifiques, don végétal de la terre, des plantes, des arbres capturés par le vent, qui tournoyaient dans une grâce qui ne fut connu que de moi seul.
Je m'en souviens encore.
Après une soirée chez des amis, je reviens par la RT2. Je suis à une distance encore éloignée de la maison, le vent se lève, souffle par rafales puissantes. Je vois de grandes lueurs à l'est qui illuminent fugitivement la bande étroite séparant la mer et le ciel. Elles m'accompagnent durant tout le parcours, explosions brèves, magnifiques zébrant tour à tour l'horizon sombre. Lorsque je tourne à gauche vers la RT2, je me rends compte que ces lumières s'élèvent aussi par moment au nord et à l'ouest. Je m'arrête, j'enlève mon casque pour essayer de percevoir le bruit du tonnerre, pour pouvoir déterminer la distance des orages. Mais nul son ne me parvient. Pourtant les lueurs muettes continuent à virevolter, Uvéa me semble cerné par la furie des tempêtes. Je continue ma route, environné par les éclairs fantastiques, précédé, éclairé, guidé par la douce lumière du phare de mon scooter.
Je rentrais d'un cours de salsa vendredi soir. Une pleine lune, immense, resplendissait dans la voûte céleste. Les nuages épais, flottaisons laiteuses, voguaient rêveusement sur la surface du ciel d'une couleur bleue très foncée qui s'approfondissait à l'infini. L'éclat de la lumière était tel que même lorsqu'il se glissait derrière les nuages, on devinait nettement les contours du disque lunaire. Et au fur et à mesure de son avancée dans la blancheur lactée, dès qu'une trouée s'opérait au sein des nuées, la lune s'enveloppait d'un halo aux couleurs chatoyantes de l'arc-en-ciel
Impressions diurnes
Je roule lentement en journée. Tout à coup, il me semble que la route s'avance devant moi, que je commence à être happé vers l'arrière. Je me rends très vite compte qu'en réalité, cette illusion optique s'explique par le fait que certaines parties sont éclairées tandis que d'autres pans se trouvent dans la pénombre en raison de quelques nuages qui cheminent en masquant le soleil, que ceux-ci vont à une allure plus vive que moi en scooter. La lumière offre quelques espaces clairs devant moi, et je me décide à accélérer pour rejoindre l'une de ces zones lumineuses. Puis, je me laisse glisser en arrière pour revenir en avant vers l'espace éclairé : je suis devenu chasseur de lumière...
Un autre jour, alors que je suis sur la RT2, je vois une averse littéralement fondre sur moi. Un nuage menaçant se dresse devant moi, une ligne constitué de grosses gouttes de pluie avance méthodiquement, mécaniquement pour avaler chaque portion de route, je m'arrête, je suis englouti. Je continue ma route, mais l'averse redouble de violence. Je rebrousse chemin, je me souviens de la vitesse avec laquelle la mince bande redoutable de pluie avançait, je suis sûr que je peux aller plus vite qu'elle et sortir de la dépression. J'accélère, les gouttes fusent, crépitent sur ma chair, m'arrachent une grimace de douleur. Mais j'aperçois soudain la ligne devant moi, et juste derrière l'éclaircie. Je me penche en avant, je donne encore un léger coup d'accélérateur : Délivrance ...
Je continue ma course folle, je me dirige à toute allure vers un banc de moineaux éparpillés sur la route. Juste quelques instants avant que je les atteigne, elles s'éparpillent en grappe, comme une magnifique gerbe d'eau, comme un geyser fusant vers le ciel.
Je ne perçois d’abord que trois
oiseaux blancs dans l’écume laiteuse du ciel. Je m’arrête sur le bord de la
route en coupant immédiatement le moteur. Tout à coup se détache un quatrième
compagnon qui se confondait à la blancheur du nuage. Les oiseaux composent
l’éternel ballet de l’imitation, le jeu captivant
de la découverte du miroir de l’autre dans l’ivresse de la compétition, ils se
dépassent, ils virevoltent, s’entrecroisent, se frôlent, s’éloignent l’un de
l’autre à tire d’aile pour se rapprocher à nouveau, s’écartent encore, parcours
en apparence erratique mais obéissant à la logique, aux règles enfouies dans
les particules de l’espèce. Battements vigoureux de leurs ailes, vols en
escadrille, planés, solos éphémères, piqués effrénés, rejaillissement vers le
ciel, accélération, décélération pour se poser un court moment sur une palme
qui luit, frissonne au vent. Ils s’élèvent vers les cieux, recommencent la
scène dans la joie partagée de la présence immanente du monde, je ressens dans
ce vol la douceur, la beauté du spectacle de l’indispensable présence de son
semblable, la muette permanence d’une rivalité sans fin entre eux qui est aussi
celle d’une communion charnelle, fraternelle, intense, de chaque volatile avec
la chair vive de l’autre.
Je les contemple longtemps.Je suis sur la route territoriale n° 1, je rentre chez moi. J'aperçois dans le ciel un arc-en-ciel tendu entre deux nuages du côté est. Je m'en étonne, car le ciel est effectivement vaguement gris vers le lagon et l'Océan, mais je ne perçois aucune trace de gouttelettes de pluie ou d'humidité dans l'air. Je continue un petit bout de chemin, et lorsque je tourne à nouveau mon regard vers la droite, je me rends compte que l'arc-en-ciel a grandi, je m'arrête pour l'admirer.
Il ne cesse de se transformer sous mon regard émerveillé, attentif. La bande de couleur s'épaissit au début, les teintes semblent se diluer tout en occupant un espace plus large. Puis à nouveau, dans une infinie lenteur, la bande se rétrécit. L'arc également s'allonge à un moment donné, la branche haute s'étire vers les nuages tandis que la branche basse pointe de plus en plus vers le lagon. Et les couleurs s'intensifient, le violet, le vert, le jaune, l'orange et le rouge se renforcent. Toujours aussi progressivement, elles pâlissent, l'arc-en-ciel semble se dissoudre, les couleurs deviennent d'une très grande pâleur, je vois les nuages en quasi-transparence, seule une légère teinte orangé tenace flotte dans l'air. C'est lié à la permanence de la trace de la couleur sur ma pupille, me dis-je, je ferme une petite minute mes paupières. Je les rouvre et, à ma grande surprise, l'arc-en-ciel au lieu de s'évanouir dans l'air s'est au contraire renforcé. Et le spectacle continue encore, jusqu'à ce que le mouvement de disparition s'enclenche à nouveau. Je ferme encore une fois les yeux, je les rouvre, évanouissement total du spectre lumineux. Je remonte sur le scooter, je découvre avec stupéfaction sur la petite montre à quartz, encastré dans le cadran du guidon, que le spectacle a duré vingt cinq minutes.
Je sais qu'il s'agit de la simple réfraction et réflexion de la lumière blanche du Soleil à travers les gouttelettes d'humidité dans l'atmosphère. Une révélation s'impose en moi : "Que la lumière est belle"
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